Portraits

Emmanuelle Gardan : « Ça se freine les peurs, ça s’efface » !

Ce mois-ci nous rencontrons, à Angers, Emmanuelle Gardan. Entrepreneuse engagée, prolifique, solidaire et à l’enthousiasme contagieux. Fondatrice de l’entreprise de communication Bonjour Midnight, de l’association pour entreprendre l’égalité Babes Voices, du festival angevin Babes Day et du podcast féministe Le F* Club. A son image, colorée et joyeuse, Emma est solaire et aime répandre sa bonne humeur dans tous les projets qu’elle entreprend. De salariée pour la firme à la pomme à cheffe de sa propre entreprise et présidente de sa propre association, Emmanuelle est le modèle de l’entrepreneuse à succès qui terrasse les freins un à un pour apprivoiser ses peurs et les supprimer petit à petit.

Bonjour Emmanuelle, peux-tu te présenter en quelques mots ?

Je suis Bretonne d’origine, arrivée à Angers en 2016. J’ai travaillé pendant quatre ans en Irlande, au service client de chez Asos puis au siège européen de Apple. Mon objectif à cette époque était d’entrer chez Google. Je n’avais pas vraiment la même vision de la vie qu’aujourd’hui (rires). J’ai fait tous les entretiens d’embauche et finalement je n’y suis pas allée.

En arrivant à Angers j’ai intégré une agence de communication locale en tant que community manager et j’y suis restée pendant deux ans et demi. En parallèle j’ai commencé à organiser mon premier évènement du Babes Day. Le but de cette première expérimentation était de mettre en lumière les entrepreneures dans la tech et dans la culture, à Angers. Ce premier évènement a été une réussite et suite à cela j’ai créé l’association Babes Voices, pour porter la voix des femmes.

J’ai donc commencé à imaginer l’association et à chercher des partenaires solides pour la consolider. En une année nous avons doublé le nombre de participants à l’évènement et de créatrices mises en lumière. J’étais alors toujours salariée de ma boite de communication. J’ai négocié une rupture conventionnelle afin de me mettre en freelance. Je voulais me lancer dans des projets qui me parlaient véritablement et qui étaient en accord avec les valeurs que je portais.

Je me suis donc lancée, de chez moi, avec deux clients réguliers. J’aurais pu compter sur le chômage auquel j’avais droit mais je n’avais pas envie car il équivalait à 950€/mois et je ne pouvais pas cumuler chômage et activité à l'époque. Dès le début je voulais me rémunérer. Pour cela je m’étais fixé bien sûr un objectif. La première version de Bonjour Midnight était née !

Entrepreneuze

Comment as-tu démarché tes premiers clients et gagné ta vie ?

Je voulais avant tout proposer du community management aux acteurs de la culture angevine. Je voulais me spécialiser dans ce domaine qui me parlait et me correspondait. La culture angevine est riche et diversifiée ! J’ai travaillé avec mes premiers clients qui m’ont permis d’avoir de belles références. Au bout de quelques mois, j’arrivais à me rémunérer 1500€ par mois net.

Comment as-tu développé ensuite ton entreprise ?

J’ai eu la superbe opportunité de travailler avec le "Summit Change Now" et "J'aime mes dents !" (actuellement Apimani) en même temps, fin 2019. C’est à ce moment-là que ma conscience écologique s’est développée et que j’ai pris conscience que je voulais consacrer mon énergie à ce genre de cause !

Puis en 2019 mon entreprise s’est développée d’un coup. Ensuite le Covid est arrivé. J’ai fait une pause forcée comme tout le monde et j’ai recentré mes services et mes envies. J’en ai profité pour proposer mes services à des associations qui en avaient beaucoup plus besoin, avec des tarifs plus accessibles. Après le confinement j’ai eu l’opportunité de trouver et louer un bureau à l’extérieur. Et là mon activité a pris une tournure inattendue. J’ai pu me payer 2000€ par mois net. J’étais très heureuse de cela. Puis la question du chiffre d’affaires en tant qu’auto entrepreneure s’est imposée. En 2021 je doublais mon chiffre d’affaires.

A quel moment as-tu eu envie de sauter le pas vers la forme juridique d’une société ?

(Rires) Une énième déclaration de TVA qui n’était pas passée correctement. Je n’en pouvais plus car j’avais l’impression de payer, en plus, beaucoup trop d’URSSAF. J’ai alors rencontré deux comptables à qui j’ai expliqué mes peurs et mes craintes limitantes quant à la société et à la forme « réelle » d’une entreprise. Je voulais avant tout comprendre comment cela fonctionnait, où j’allais et ce qui différait d’une auto entreprise.

J’ai rencontré une femme exceptionnelle dans un cabinet comptable local et tout a super bien matché. C’est elle qui m’a poussée à faire un prêt professionnel pour mon activité. Ce jour-là, on a parlé de maternité par exemple. En fait, des vrais sujets qui concernent les femmes dans l’entrepreneuriat et plus globalement. Je me suis sentie comprise et en totale confiance. Je me suis donc lancée en créant la société Bonjour Midnight, qui était jusqu’alors une simple marque, en décembre 2022. J’avais également suivi la formation Finance, Gestion et Leadership de JMS LeadHer by JMS Formation, qui a aussi permis de faire sauter de nombreuses peurs que j’avais. J’ai pratiquement mis une année à créer ma société parce que j’avais finalement toutes ces peurs qui m’entravaient et qui n'avaient pas lieu d'exister si ce n'est dans ma tête !

Où en est Babes Voices à ce jour ?

Après six ans d’édition (de 2017 à 2022)...

Nous avons commencé la première édition à 20 participant.e.s. Puis à 40 l’année suivante. Puis à 80 l’année d’après. Puis à 150 lors de la dernière édition. Le Jour J nous mobilisions environ 30 bénévoles et durant l’année nous étions 5 personnes qui œuvrions tous les jours pour préparer l’édition suivante. C’était énorme et dingue, j’en ai encore des frissons quand j’en parle !

Mais malheureusement, c’est moi qui « pilotais la barque ». Beaucoup de choses reposaient sur moi. Notamment les rendez-vous avec les partenaires financiers les plus importants. Cela avait tendance à trop m’impacter dans mon quotidien d’entrepreneure.

Je ressentais le besoin de questionner la structure et le concept mais je ne trouvais même pas le temps finalement de le faire. J’éprouvais la frustration de vivre quelque chose de très fort pendant les deux jours de festival, les gens rencontrés étaient très intéressants. La 6ème édition devait se passer au Chabada et avoir une amplitude encore plus grande. Mais tout cela m’a demandé énormément d’énergie et je sentais que je n’en avais plus assez pour une nouvelle édition. J’ai donc mis le festival entre parenthèses pour le moment.

Il faut aussi savoir où sont ses limites dans l’entrepreneuriat et la création de projets. Et c’est ok finalement de dire « là cette année il n’y aura pas d’événement ». Du coup l’objectif est devenu pour le moment de prioriser le podcast que nous avons également lancé avec l’association; Le F* Club. Cette année, nous en sommes à notre quatrième saison à raison d’un épisode par mois.

En décembre (2023) cela fera 5 ans que je suis à mon compte. Je ne regrette aucun de mes choix !

Quel conseil souhaites-tu transmettre ?

Le réseau fait beaucoup quand on créé sa propre entreprise et que l'on démarre. Il ne faut surtout pas le négliger !

Il faut aussi apprendre à avoir un espace de parole sécurisé pour tout "lâcher" et où on a le droit de tout dire. Moi par exemple, je suis coachée depuis quelques années maintenant, par une psychologue spécialisée dans le travail et l’entrepreneuriat. C’est aussi primordial quand on est entrepreneur ne pas oublier la liberté que c’est censé nous apporter. Se dire régulièrement, « ça si je peux le faire, c’est parce que je suis entrepreneur ».

Il faut savoir s’auto discipliner et être avec soi-même la meilleure patronne/le meilleur patron que l'on aimerait avoir si nous étions salarié.e. On a vite fait de finir à 20 heures tous les soirs et de sauter des repas. Ce n’est pas la clé de l’épanouissement ! Il faut croire en soi et savoir aussi écouter sa fatigue !

Par Bérengère Soyer
Crédit photo Emmanuelle Gardan

Ajouter un Commentaire


ABONNEZ-VOUS À LA NEWSLETTER

Restez connectés aux nouvelles !