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Retour sur la table ronde : les enjeux de l'émancipation économique des femmes et des filles

Le 10 mars dernier, à l 'occasion de la semaine internationale des droits des femmes, Entrepreneuze était partenaire de la conférence/table ronde organisée par JMS Mixité et le Crédit Mutuel Anjou ; Les enjeux de l'émancipation économique des femmes et des filles. Nous revenons, au travers de cet article, sur cette soirée placée sous le signe du posititivisme et de l'ouverture !

La conférence, dans un premier temps, était animée par Bérengère Soyer, fondatrice de Entrepreneuze et associée de JMS Mixité. Pour voir ou revoir la conférence : Conférence Les enjeux économiques de l'égalité femme/homme - Angers 10 Mars 2022. Dans un second temps, la table ronde était l'occasion de rassembler des acteurs.trices du monde économique, associatif et éducatif, afin de faire un état des lieux de la société globale et des pratiques ou des idées à mettre en place pour faire de nos organisations, des instances réellement inclusives !

Le premier échange avait lieu avec...

témoignage laure rondeau desroches

Frédérique Camut, représente et directrice de caisse du Crédit Mutuel Anjou

"Bonjour Frédérique, parlez-nous un peu de votre parcours..."

Mon parcours au Crédit Mutuel Anjou est plutôt classique puisque j'ai fait toute ma carrière là bas. Je suis devenue directrice de caisse il y a 6 ans. J'ai évolué assez rapidement. Mais ce n'est pas inhabituel chez nous de gravir les échelons relativement vite.

"Parlez-nous des bonnes pratiques qui ont été mises en place au Crédit Mutuel Anjou pour accélérer l'égalité f/h...

En effet, au Crédit Mutuel Anjou, l'état des lieux des actions pour faire évoluer l'égalité femme/homme est assez positif. Au sein de notre organisation, nous distinguons deux types de population : d'un coté les salariés du Crédit Mutuel et de l'autre les élus des caisses. Nos chiffres sont très similaires par rapport à la moyenne nationale de la représentativité des femmes et des hommes : chez les salariés il y a 60% de femmes pour 40% d'hommes. Mais dès que nous montons chez les managers il n'y a plus que 30% de femmes managers et 70% d'hommes managers. De même chez les élus des caisses, les femmes représentent 44% et les hommes 55%. Pourtant, lorsque nous regardons les président.e.s, il n'y a plus que 30% de femmes présidentes et 70% d'hommes présidents.

Ainsi, et pour aller dans le bon sens, nous avons fait évoluer nos statuts en 2017 pour la présidence du conseil fédéral (les élus de la fédération) afin que les femmes vice-présidentes puissent être élues au conseil fédéral, ce qui n'était pas le cas jusqu'en 2017. A ce jour nous n'avons qu'une femme qui est entrée au conseil fédéral. Malheureusement, les candidatures féminines manquent encore un peu ! Mais malgré tout, nous mettons en place des marqueurs significatifs afin de faire évoluer les choses au plus vite.

"Quels genres de marqueurs ?"

Depuis 2018, nous avons instauré des "enveloppes de rattrapage pour les inégalités salariales". Dès lors, il y a eu 3 campagnes de rattrapage et 67 situations corrigées au niveau des salaires, pour les femmes qui avaient eu moins de possiblités d'évolution au cours de leur carrière. Nous avons également diffusé des portraits des femmes directrices et managers au cours d'une grande campagne de communication et de sensibilisation. Afin de montrer aux autres collaboratrices que ces métiers leur étaient également destinés et accessibles.

Enfin, nous avons instauré au sein de notre école de direction, des promotions parfaitement mixtes. Dans le cas où ce ne serait pas respecté, les promotions ne sont pas lancées. Afin d'avoir par la suite un ratio égalitaire entre nos directeurs et directrices de caisse. La vraie difficulté aujourd'hui est que les femmes cessent de s'autocensurer !

*

L'échange se poursuit ensuite avec...

témoignage laure rondeau desroches

Christophe Rouvrais, directeur général de l'école d'ingénieur ESAIP à Angers

"Bonjour Christophe, parlez-nous à votre tour de votre parcours..."

J'ai pris la direction de l'ESAIP en août 2014. Mon parcours est plutôt atypique puisque je suis ingénieur de formation puis j'ai travaillé un peu dans l'industrie et enfin je me suis intéressé au milieu de l'enseignement et de la recherche.

"Quels changements avez-vous opérés dès les premiers instants ?"

Lorsque j'ai été nommé directeur, j'ai voulu éviter les situations dites anormales. J'ai donc immédiatement tout mis en oeuvre pour tendre vers une égalité entre les femmes et hommes. J'ai la chance aujourd'hui que notre comité de direction soit à égalité parfaite. De même notre index égalité femmes/hommes est de 90/100. Enfin, à la tête de nos pôles à dominante scientifique, nous avons beaucoup de femmes en tant que directrices.

"Comment procédez-vous ?"

A compétences égales, j'essaie au maximum de recruter le profil qui me permettra l'équlibre le plus juste. Je ne pratique pas particulièrement la discrimination positive qui, selon moi, peut produire l'effet inverse. Lorsque je suis arrivé à la direction, j'ai par exemple interdit toutes les réunions stratégiques qui pouvaient avoir lieu avant 9h30 et après 17h30. Si l'on veut que les femmes puissent prendre part aux décisions stratégiques, ce sont des pratiques qu'il faut bannir à tout prix.

Pendant les confinements et notamment à l'heure du télétravail, j'ai fait passer quelques messages par des courriels afin que toutes les organisations entre vie privée et vie professionnelle puissent être les plus justes possible et notamment entre le conjoint et la conjointe. Je me tenais à disposition du mari si trop d'absences pour garde d'enfant, par exemple, étaient répétées de la part d'une collaboratrice.

C'est un signal fort que nous pouvons envoyer en tant qu'employeur notamment. Je suis moi meme l'heureux papa de deux enfants et je les récupère très régulièrement le soir à l'école. En cas de cas Covid par exemple, je les récupérais dans la journée et les amenais avec moi sur le campus. C'est à travers cette approche et en montrant l'exemple que l'on peut, entre autre, faire évoluer les choses.

"Comment les étudiants, globalement, appréhendent l'égalité fille/garçon ?"

J'oeuvre depuis 20 ans pour faire évoluer les choses dans les filières scientifiques chez les garçons et les filles. Sur le campus nous avons 35% de filles étudiantes pour 65% de garçons. Je m'estime heureux et chanceux car ce n'est pas le cas dans tous les campus d'ingénieurs. Nous travaillons beaucoup sur les roles models et sur les témoignages afin que, par exemple, au moment des portes ouvertes, les filles puissent rencontrer d'autres filles et s'identifier à elles.

Nous avons été faire de la sensibilisation dans les lycées, dans les collèges et jusque dans les écoles primaires. Le pourcentage de filles formées aux métiers d'ingénieurs augmente peu mais dans la mesure où le nombre d'ingénieurs formés augmente de plus en plus ces dernières années, alors le nombre de filles augmente avec. C'est le plus positif !

"Qu'est-ce qui reste encore à construire ?"

Ce qui reste encore le plus compliqué à faire changer bien souvent, ce sont les familles elles-mêmes. Le monde enseignant a beaucoup évolué sur la gestion des clichés, des stéréotypes, sur les questions du genre dans les représentations etc. Mais les familles, les parents, les grands-parents, oncles ou tantes, avec une simple phrase du style : "Tu ne vas pas faire un métier de mec !" ou "Tu ne vas pas porter des chaussures de sécurité toute la journée !" démontent en quelques secondes le travail de persuasion, que nous aurons mis une journée de portes ouvertes, à construire.

Enfin, depuis la réforme Blanquer du lycée en 2019, la problématique du vivier d'entrées est également un gros frein à l'admission des filles dans les fillières scientifiques. En effet, nous avons perdu 25% du potentiel que représentaient les filles étudiantes dans les filières scientifiques. Les maths doivent donc absolument rester au tronc commun tout comme le français par exemple. Afin de maintenir un taux de féminisation intéressant et important dans les métiers des sciences !

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Nous terminons la discussion avec...

témoignage laure rondeau desroches

Véronique Rochard, fondatrice associée de la société M2X et vice-présidente de l'association Femmes Chefs d'Entreprises 49

"Bonjour Véronique, pouvez-vous à votre tour nous parler de votre parcours..."

Je suis ingénieure électronique de formation. Il y a 30 ans, dans une promo de 50 élèves, nous étions deux filles ! (Rires). J'ai créé et développé une société au croisement entre l'informatique et l'électronique. Au quotidien, je ne travaille qu'avec des hommes et essentiellement pour des hommes. Malheureusement c'est ainsi, les femmes sont encore trop peu présentes dans mon secteur d'activité.

J'ai toujours été plus ou moins confrontée à cette problématique de non mixité dans mon travail. Pour l'anecdote, il y a 25 ans, un de mes collaborateurs est allé voir, dans mon dos, mon responsable pour lui dire qu'après mon congé maternité de 6 semaines, je ne serai plus suffisamment compétente pour retrouver mon poste. Aujourd'hui, je suis mère de trois enfants, je suis cheffe d'entreprise et mon mari l'est également. Nous nous sommes toujours entraidés mutuellement pour que la charge parentale, familliale et autre soit équitable.

"Parlez-nous de l'association Femmes Chefs d'Entreprises."

J'ai choisi de rejoindre l'association FCE il y a quatre ans, pour permettre aux autres femmes d'oser et surtout de ne pas avoir peur de se lancer. Je voudrais sincèrement que l'on rêve aux mêmes choses pour nos filles que pour nos garçons !

Les femmes, en France, dans le monde entrepreneurial ne réprésentent qu'un tiers des chefs d'entreprises et elles ne représentent que 15% de la gouvernance économique. J'ai lu récemment que nous avions en France, moins de femmes entrepreneuses qu'en Azerbaïdjan ! Avec moins de moyens, les femmes africaines sont les championnes du monde de l'entrepreneuriat ! Cela prouve bien qu'il n'y a pas de raison pour que les femmes en France ne puissent pas se lancer et accéder à l'entrepreneuriat.

"Pourquoi, selon-vous, les femmes se lancent moins ?"

Le syndrome de l'imposteur, comme le disait Frédérique tout à l'heure, est encore trop présent chez les femmes, alors que ces dernières sont bardées de diplômes et qu'elles ont toutes les compétences requises. La problématique de la sensiblisation à l'entrepreneuriat et des roles models est très présente et les femmes sont, de fait, moins sensibilisées que les hommes. Tout ceci réuni fait que nous n'osons pas y aller !

Les réseaux de femmes entrepreneures tels que Femmes Chefs d'Entreprises sont importants pour mettre en lumière le rôle que les femmes ont dans le monde économique mais aussi pour permettre des représentations féminines via des mandats. Pour avoir aussi un poids auprès des politiques, des organisations gouvernementales etc. Car comme le dit notre mantra "seules nous sommes invisibles, ensemble nous sommes invincibles !".

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Pour clore cette soirée riche en échanges et en discussions, Fanny Benedetti, directrice exécutive de ONU Femmes France, nous a fait l'honneur de prendre la parole au travers une vidéo enregistrée quelques heures avant la soirée...

Bonjour à toutes et à tous, je me réjouis de m'adresser à vous en ce jour de la journée internationale des droits des femmes et je félicite l'initiative de JMS et Crédit Mutuel Anjou d'avoir organisé cet évènement.

ONU Femmes est l'entité globale qui défend les droits des femmes et l'égalité de genre dans le monde entier. Nous avons des programmes dans plus de 110 pays. Nous nous associons beaucoup aux acteurs du monde privé en particulier, pour mener à bien notre mission. Les entreprises en effet sont des acteurs primordiaux de l'économie et elles peuvent conduire des actions transformatives en matière d'égalité femme/homme !

C'est ce que nous faisons grâce aux principes d'autonomisation des femmes dans l'entreprise (Women Empowerment Principles) qui sont une charte globale que nous vous appelons à signer et à rejoindre puisqu'elle permet de donner un cadre à vos actions transformatives. Elle dresse tout le champ des vos activités, qu'il s'agisse de la santé, de l'égalité salariale et professionnelle, de la formation, de la parité, du rôle des femmes dans le leadership... tous ces sujets font partie de notre charte d'autonomisation économique des femmes.

De très grands groupes et toutes sortes d'entreprises (plus de 6000 dans le monde) l'ont déjà signée. Je sais que vous êtes déjà toutes et tous actives et actifs sur ce sujet et je vous en félicite. Je vous remercie de prendre part à cette journée et je vous remercie pour votre engagement pour l'égalité femme/homme.

Crédits photos JMS, Entrepreneuze et Crédit Mutuel Anjou

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